5h31
Alors ça s’est passé comme ça…
Ou ? Rue Gassendi, 75014
Lui? Jann Halexander
Moi ? Ludovic Caussin
Le piano ? Bertrand Ferrier
Le pote ? Michael Bond
L’invité ? Alex Deval
Quand ? 3h avant Belgique-Portugal
C’est bien comme ça, non ? Là, franchement, si vous vous gourez d’adresse de lecture, je jette les dés-espoir.
Et mimi ? Je vous l’ai dit. Il est là, il est pas là… c’est pareil. Il est pas loin, mais j’ai un truc à dire ce matin…
Vraiment, j’hésite…
Une Chronique à Ludo Jann Halexander, par Ludo, et à la manière de Ludo, ça pourrait le bousculer un peu, le Jann…
Essayons tout de même…
La Chronique à Ludo : Jann Halexander, ou, comment rien n’a changé…
Rien n’a changé… rue Daguerre.
Une chanson de Jann s’intitule : Requiem pour Dewaere, et Jann nous la présente en même temps qu’il évoque cette rue où il a vécu, Patrick. La rue Daguerre. Patrick Dewaere.
Moi, à ce moment-là du concert, je dormais peinard en attendant le match du soir, et puis, j’avais dépouillement à 20h (On a ga-gné ! On a ga-gné ! On a ga-gné !... Heu, les régionales de notre quartier, hein, sinon, rêvez pas ! J’habite un quartier, moi, j’habite pas toute une région !)
Je dormais, tranquille, bercé par le piano et la voix, quand soudain Jann m’a réveillé. Il a parlé d’un grand artiste bla bla truc qu’avait vécu là et là, oui, là, rega rdez mieux, merde, je vous dis : Là ! Je me suis dit, il va en parler !
Alors, j’attends un peu, le temps qu’il fasse son laïus d’intro jusqu’à ce qu’il arrive au nom, et là (vous y êtes) : Patrick Dewaere !
Vous êtes comme moi, vous dites : Patrick Dewaere ?
Je vous promets qu’il a dit ça ! J’étais là, je dormais plus à ce moment-là!
Il a pas dit Jacques Demy, il a dit Patrick Dewaere !
Me suis rendormi illico, jusqu’au match (dépouillement sympa, cela dit, imaginez la turbine qui dépouille avec des gens, des vrais gens en plus, on a bien rigolé…)
Jacques Demy/Agnès Varda/La rue Daguerre.
Et qui rime avec Dewaere, car ta chanson est super, mon petit Halexander…
La rue Daguerre, je la prenais chaque lundi matin, pendant deux ans, il y 28 ans, depuis l’avenue du Maine jusqu’à Alésia, à 5h45 du mat’, car j’ai toujours aimé l’aube.
J’allais prendre un bus, direction Rungis, pour filer un coup de main à mon beau-père, et ensuite, j’allais à la fac voir les filles… (silence Bref !)
Le mieux de cette affaire, c’est que j’avais la guitare dans le dos, au cas où je serais devenu célèbre à Rungis ou ailleurs…
Cela-dit, j’étais déjà célèbre dans le bus… purée la tête des mecs avec leur blouse blanche quand j’y montais !
Parce que c’était presque un direct Rungis, voyez l’ambiance ! Et puis, le départ était à Alésia, alors il stationnait un peu, on avait le temps de se connaître un peu… Et quand on arrivait au secteur viande, les gens, ils me voyaient avec la gratte, ils pensaient pas que j’étais artiste, ils pensaient que j’étais Pédé !!!!!!!!!!!!!!!!
Ma vie est un roman, qu’est-ce que j’y peux ?
La table de montage d’Agnès se trouvait à l’entrée de la rue Daguerre, côté Maine. Tu pouvais pas te gourer, y’avait les affiches des Demoiselles et autres âneries du grand Jacques.
En face, ils avaient un local, aussi.
Jacques Demy/Agnès Varda…
Quand t’es un peu rêveur et déjà étudiant en cinéma (coucou les filles), ça peut impressionner. La taille de la montagne Varda, c’est quelque chose… C’est hors-catégorie, ce genre de bonne femme…
Jacques, j’en parle même pas. Lui, on était sûr qu’il était artiste car il était Pédé !!!!!!
Alors un jour, 25 ans plus tard, environ, je me pointe avec une gamine du côté de la rue Daguerre. Une gamine handicapée, je veux dire. J’ai un vrai métier, moi aussi !
« Ces gens-là », quand ils travaillent dans un beau quartier, ils le savent pas. On les emmène au Monop pour qu’ils apprennent à compter l’argent, et au parc derrière la mairie, pour qu’ils courent dans tous leurs sens, où qu’ils s’assoient sur un banc, immobiles…
Alors, je lui dis : Viens, je vais te montrer une rue sympa…
La rue Daguerre. La rue de Jacques, d’Agnès, et de Patrick, et d’autres certainement aussi…
Et au bout de la rue, y’a les affiches de ciné… Alors je toque à la porte.
J’ouvre et Agnès est à la table de montage, c’est pour ça que j’ai pas vu sa grande taille, elle était assise.
Elle me dit qu’elle monte encore ici, mais qu’ils ont vendu en face. Et elle me raconte des trucs. À nous, en fait, on est 2…
Rien n’a changé…
Rue Daguerre.
Jann y visite ses fantômes, et moi, j’ai les miens…
L’endroit est devenu un restaurant Vegan… mais rien n’a changé vraiment. La façade de la boutique de l’accordeur d’accordéon est toujours là, elle. Vieillie, jaune pisse, mais elle est là pour rappeler que le temps passe mais qu’il reste du temps. Notre temps. Le temps présent, habité de nos souvenirs, de nos gens à nous et de la vie qui passe…
Alors, le concert de Jann…
Bon, déjà, je vais vous dire un truc que vous savez déjà : j’aime le rock qui tache !
J’adore les solos de guitare !!!!!
Et j’adooooooooore Pat Metheny !!!!!!!!
Et Scofield, Gambale, Cusson, Vernon Reid, Angus Young, Kotzen, Joao, Baden Powell et René Thomas !!!!! Et les autres Vai, je les adore aussi, surtout Greg Howe !!!!!
La chanson française, pas trop…
Alors, en ce moment, je rame ! Jamait et Sarclo dans la même semaine, y’a 15 jours , déjà, j’avais trouvé ça bof, question solos de gratte, mais alors le concert de Jann…
Quand j’ai vu l’endroit, en plus, je me suis dit qu’on était mal barré, question saturation…
Le truc s’appelle : Théâtre Atelier du Verbe….
Non mais Allooooooooooooooooooooo !
De la chanson française, avec du verbe en plus !!!! Je rêve !
Mais pourquoi moi ???????????????
Pourquoi je lui ai dit que je viendrai (merci encore pour la réduc, Jann) ?
Pour me préparer, j’ai gardé la ligne pour pas perdre le fil, j’ai écouté Gerry Rafferty dans la rue, depuis l’attache vélo jusqu’à la salle (enfin, salle, on dirait mon salon). T’écoutes Gerry Rafferty, et comme ça, si tu te tapes une merde de concert après, et que Pecresse l’emporte, t’as sauvé ta journée !
Alors, me revoilà à me retaper de la chanson française bla bla, avec des verbes en plus !
Avec Jamait et Sarclo, y’avait de la dérision, on s’était bien marrés quand même. Là… question foutage de gueule… triple bof !
Le pianiste, il sort un sourire à la fin du 4ème titre !
Mais purée, on est à Pleyel là ou quoi ?
En plus, veste noire, chemise blanche, petit nœud papillon avec motifs colorés, les lunettes et la queue de cheval… le mec se pointe seul sur scène, je me suis dit : C’est le 3ème concerto de Rachmaninov en première partie !!!!!!!
J’avais dépouillement à 20h !!!! A l’aide !!!!!!!!!!!!!!!!!!
Bon, je peux vous le dire, le mec est normal, et en plus il joue bien…
Nan, je dis ça parce qu’à la sortie de la salle (mon salon), il est allé voir un truc dans la bagnole garée en face et il a des baskets vertes !!!!!!!!!!
J’avais pas vu !!!!!!!!!
Veste noire, chemise blanche, petit nœud papillon avec motifs colorés, les lunettes et la queue de cheval et les pompes bio !!!!!!!!!
Bon, si je vous raconte tout ce que j’ai entendu à la sortie, je fais une pièce de théâtre…
Le premier couple qui sort, ils se barrent, la meuf, elle a l’air contente, elle parle des chansons : y’en a des biens, et y’en a des terribles aussi !!!!!
Ahahahaha, la poilade. Ça devait être une critique d’art, la fille.
Message perso à Michael Bond :
- Bonjour Michael. C’est moi. Le mec aux lunettes noires, sweat-shirt pourri mais bleu, qui traînait statique quand tu racontais l’histoire de ton nouveau clip… Alors déjà, fais gaffe, Mel G est un ami personnel, et il vient souvent à la télé dans mon salon… Tu m’enverras le clip, pour la peine. Nan, t’inquiètes, je rigole en fait. Mais avant-hier, on m’a mis en garde contre tous ceux qui rôdent autour de nous et qui profitent de nos idées parce qu’ils n’en ont pas…
C’est pour ça que Catherine Loeb, elle est pas milliardaire, tu vois… Parce que La Ouate (t’étais pas né, cherche pas), c’est elle qui l’a écrite, mais on l’a déposée à sa place… et bye bye la richesse…. Donc, méfiance, surtout si tu vois un mec louche en bleu à côté de toi !
Purée, 5 pages de bla bla déjà et j’ai rien dit sur Jann. Je vous dis qu’il va faire la gueule.
Je vais essayer d’être précis.
Je vais régler le problème de l'éclectisme, Jann, pour donner suite à notre conversation sur le trottoir. Tention :
JE NE SUIS PAS ECLECTIQUE BORDEL DE MERDE !!!!!!!!
(Zavez vu comment je règle les problèmes, moi ?)
L'éclectisme, c’est un peu un éparpillement des sens, dans tous les sens, c’est à dire nulle-part.
Je te prends un exemple : T’as déjà dû remarquer ces gens qui, quand tu leurs demandes ce qu’ils écoutent, te répondent : Un peu de tout !
Sont nombreux en plus !
Quand tu les as trouvés, plonge-les dans un océan musical pour la démonstration. Tu leur fais écouter :
1/Le début d’In Silent Way de Miles. Ils te demandent au bout de 5 minutes, quand est-ce que ça démarre…
2/ N’importe quoi de Baden Powell. Ils te demandent si c’est du flamenco ?
3/C’était quoi la question de Dalcan. Ils te disent : il est connu, lui ?
4/ (juste pour rire), un Devin Townsend qu’envoie le paté, genre By Your Command. Ils oublient d’ouvrir la porte en sortant, ils se la prennent dans la gueule !
T’as compris ? Tu peux faire ta liste, ils ne l’aimeront pas non plus, eux, ceux qu’écoutent de tout.
Ce sont eux, les éclectiques. Les papillons quand y’a pas vent. Ils volent pas, ils font du sur place. Mais ils n’ont pas de racines non plus. Alors le vent, dès qu’il souffle, les emmène un peu plus loin, et ils recommencent à s’enliser, jusqu’à la prochaine fois. Ça donne des gens qui, quand tu leur parles d’un bouquin, te répondent : Je l’ai lu déjà, y’a longtemps.
Façon de te dire que c’est déjà consommé, avalé et recraché, et qu’il n’en reste rien parce que ce qu’ils ont à en dire, c’est qu’ils l’ont déjà lu…
Les éclectiques.
Aucune mémoire de rien puisqu’ils écoutent de tout. Mais qu’ils n’entendent rien !
C’est bon, Jann, ou tu veux que je m'énerve ?
Je ne suis pas comme ça.
Je suis comme toi, nous sommes des artisans, des ciseleurs et des poètes. Et nous creusons sans cesse le même trou. Point. Et quand on regarde le trou du voisin, on se dit que s' il ressemble au mien, c’est que ça doit être bien aussi !
J’ai beaucoup aimé ton concert. Je vais te donner un indice pour le comprendre. L’indice, c’est : la longueur de la Chronique. Et je dois aller écrire à 8h au plus tard, il me reste peu de temps.
Je n’ai qu’une chose à dire, en fait. Et puis, je te l’ai dit, je reviendrai t’écouter…
Avant de venir, j’avais vu un bout d’une vidéo d’un spectacle récent de toi, et j’avais pas trouvé ça terrible. Limite maniéré. Je me suis dit, vraiment, j’y vais mais je vais me faire chier !
Allez, je fais court.
J’ai adoré dès la première minute, et pour une raison simple, qui, quand tu l’acceptes, te rend les choses faciles pour la suite…
Jann Halexander, c’est un maniéré. C’est un précieux. C’est un styleux.
C’est un bloc entier, sans aucune rayure de comédie dedans. Jann ne rie pas, même s’il nous fait rire, de lui, et de nous.
Mais en fait, Jann ne rie pas.
Il ne rie jamais car c’est un bloc. Tu prends, tu prends pas, c’est tout.
J’ai rarement vu un artiste aller si loin, jusqu’au bout de lui-même.
Il y croit, donc t’y crois.
Jann n’est pas venu pour rigoler, il est venu pour dire quelques vérités bla bla, souvent magnifiques (mention pour Rester par habitude) et depuis sa stature de commandeur.
Il faut que vous compreniez que tout ça se joue ailleurs que dans la posture.
Jann est une incarnation.
Un géant, parfois, et qui s’assoit et prend ses distances sur scène… Étonnant.
Rien à voir avec Jamait et Sarclo, magnifiques aussi, mais pour d’autres raisons…
Il n’y a pas de distance, pas d’ironie, chez Jann.
Ailleurs, ce côté précieux paraîtrait ridicule, Molière nous l’a dit.
Ici, cette préciosité est une force (et une farce, c’est de l’entertainment, quand même !), et loin d’être ridicule, elle devient sa bonne manière d’être.
À la fin, t’as devant toi un artiste stylé. C’est-à-dire un maniéré qu’a trouvé son style, qui l’a accepté.
C’est sa vérité. Jann ne triche pas. Je vous promets, allez-y, c’est impressionnant.
Et finalement, j’étais content. Nous, les non-essentiels, c’est rare qu’on dise de nous que nous sommes précieux…
J’étais donc content car j’avais trouvé un nouveau joujou : maniéré, stylé, précieux.
Et pas ridicule, en plus.
Un artiste, quoi !
Ps : En me barrant, j’ai remis Gerry Rafferty ! On sait jamais, la journée était pas finie et Pécresse pouvait l’emporter…
Source : https://www.facebook.com/groups/2707132616177277